Entretien motivationnel et troubles musculosquelettiques du musicien
À l’instar du sport de haut niveau, la maîtrise d’un instrument de musique est une tâche exigeante, qui nécessite de nombreuses heures d’entraînement et sollicite la santé du musicien tant sur le plan physique que mental. À cette différence près que le musicien ne dispose pas d’un suivi médical équivalent à celui du sportif de haut niveau. La pratique intensive d’un instrument de musique peut causer une sollicitation excessive de l’appareil locomoteur (squelette, muscles, ligaments, tendons, cartilages, nerfs, laquelle joue un rôle déterminant dans la genèse, le maintien ou l’aggravation de blessures de nature passagère ou irréversibles, et, dans les cas les plus graves, conduit à des états chroniques d’incapacité. La plupart du temps, ces troubles s’accompagnent en outre de douleurs et de gênes fonctionnels plus ou moins importants, souvent quotidiens, au niveau de la nuque, de la tête, du dos, de la main, des doigts.
Parmi les éléments déclenchants de ces troubles, on compte d’abord les facteurs biomécaniques (les mouvements répétitifs et rapides, le maintien d’une posture asymétrique pour s’adapter à la forme, à la taille ou au poids de l’instrument, les mauvaises habitudes dans la technique de jeu), viennent ensuite les facteurs organisationnels (le temps de jeu excessif, le changement d’instrument), les facteurs psychosociaux (le niveau d’exigence en termes d’attention, de charge de travail ou encore la pression liée à la performance) et les facteurs individuels (l’âge, l’état de santé, les traitements médicamenteux, la morphologie), etc.
Si les kinés gèrent le processus de guérison en appliquant des traitements et des techniques ciblées sur la pathologie, ils donnent également des indications en matière d’auto-traitement et des conseils, notamment dans le domaine de l’ergonomie, visant soit à prévenir ou à réduire la survenance ou la persistance des troubles. La prescription d’exercices à domicile est par ailleurs une pratique de plus en plus répandue chez les kinés et fait désormais souvent partie de leur prise en charge. L’éducation du client quant à elle fait référence à la nécessité de modifier certains comportements ou habitudes de vie afin de prévenir toute nouvelle atteinte au système locomoteur.
Une littérature scientifique de plus en plus importante montre que ces deux derniers critères, l’éducation du client et le recours aux exercices à domicile, conditionnent en grande partie l’efficacité de la prise en charge en kinésithérapie musculosquelettique. Que faire dès lors lorsque le client ne suit pas les conseils ayant pour objet une modification de comportement dans des situations défavorables ? Que faire également quand ce dernier ne fait pas les exercices prescrits ? Le professionnel doit-il se limiter à prendre en charge le client de manière passive ou doit-il au contraire imposer à son client son point de vue d’expert ? Pour répondre à ces questions, l’entretien motivationnel se révèle d’une redoutable efficacité !
L’entretien motivationnel a pour objectif de conduire la conversation entre le professionnel et son client de manière telle que ce dernier fasse émerger sa propre motivation au changement, en se fondant sur ses valeurs et intérêts propres. Cet entretien prend la forme d’un partenariat collaboratif, au terme duquel le choix final de changer ou non appartient au client, l’autonomie de ce dernier ne pouvant à aucun moment être mise en doute. Parce qu’il renforce leur compliance au traitement et en augmente les chances de succès, l’entretien motivationnel s’avère être très efficace avec les musiciens qui, en raison de douleurs et de gênes fonctionnels plus ou moins importants, se trouvent obligés de modifier leurs comportements ou habitudes de vie.