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Mois : mai 2020

Entretien motivationnel et troubles musculosquelettiques du musicien

À l’instar du sport de haut niveau, la maîtrise d’un instrument de musique est une tâche exigeante, qui nécessite de nombreuses heures d’entraînement et sollicite la santé du musicien tant sur le plan physique que mental. À cette différence près que le musicien ne dispose pas d’un suivi médical équivalent à celui du sportif de haut niveau. La pratique intensive d’un instrument de musique peut causer une sollicitation excessive de l’appareil locomoteur (squelette, muscles, ligaments, tendons, cartilages, nerfs, laquelle joue un rôle déterminant dans la genèse, le maintien ou l’aggravation de blessures de nature passagère ou irréversibles, et, dans les cas les plus graves, conduit à des états chroniques d’incapacité. La plupart du temps, ces troubles s’accompagnent en outre de douleurs et de gênes fonctionnels plus ou moins importants, souvent quotidiens, au niveau de la nuque, de la tête, du dos, de la main, des doigts.

Parmi les éléments déclenchants de ces troubles, on compte d’abord les facteurs biomécaniques (les mouvements répétitifs et rapides, le maintien d’une posture asymétrique pour s’adapter à la forme, à la taille ou au poids de l’instrument, les mauvaises habitudes dans la technique de jeu), viennent ensuite les facteurs organisationnels (le temps de jeu excessif, le changement d’instrument), les facteurs psychosociaux (le niveau d’exigence en termes d’attention, de charge de travail ou encore la pression liée à la performance) et les facteurs individuels (l’âge, l’état de santé, les traitements médicamenteux, la morphologie), etc.

Si les kinés gèrent le processus de guérison en appliquant des traitements et des techniques ciblées sur la pathologie, ils donnent également des indications en matière d’auto-traitement et des conseils, notamment dans le domaine de l’ergonomie, visant soit à prévenir ou à réduire la survenance ou la persistance des troubles. La prescription d’exercices à domicile est par ailleurs une pratique de plus en plus répandue chez les kinés et fait désormais souvent partie de leur prise en charge. L’éducation du client quant à elle fait référence à la nécessité de modifier certains comportements ou habitudes de vie afin de prévenir toute nouvelle atteinte au système locomoteur.

Une littérature scientifique de plus en plus importante montre que ces deux derniers critères, l’éducation du client et le recours aux exercices à domicile, conditionnent en grande partie l’efficacité de la prise en charge en kinésithérapie musculosquelettique. Que faire dès lors lorsque le client ne suit pas les conseils ayant pour objet une modification de comportement dans des situations défavorables ? Que faire également quand ce dernier ne fait pas les exercices prescrits ? Le professionnel doit-il se limiter à prendre en charge le client de manière passive ou doit-il au contraire imposer à son client son point de vue d’expert ? Pour répondre à ces questions, l’entretien motivationnel se révèle d’une redoutable efficacité !

L’entretien motivationnel a pour objectif de conduire la conversation entre le professionnel et son client de manière telle que ce dernier fasse émerger sa propre motivation au changement, en se fondant sur ses valeurs et intérêts propres. Cet entretien prend la forme d’un partenariat collaboratif, au terme duquel le choix final de changer ou non appartient au client, l’autonomie de ce dernier ne pouvant à aucun moment être mise en doute. Parce qu’il renforce leur compliance au traitement et en augmente les chances de succès, l’entretien motivationnel s’avère être très efficace avec les musiciens qui, en raison de douleurs et de gênes fonctionnels plus ou moins importants, se trouvent obligés de modifier leurs comportements ou habitudes de vie.

Entretien motivationnel et prise en charge de la douleur chronique

Nombreux sont les médecins, kinésithérapeutes, ostéopathes et autres professionnels des soins de santé qui, de manière régulière, sont confrontés à la douleur chronique de leur patient. Lorsqu’elle perdure, cette douleur chronique se révèle souvent exténuante, physiquement et mentalement, et a des répercussions importantes sur la qualité de vie du patient : perte d’autonomie, dépression, difficultés professionnelles, isolement social. Cette douleur peut en outre être d’autant plus mal vécue que, souvent, elle n’est reconnue ni par l’entourage du patient ni par son employeur. Dommage, parce qu’il s’agit d’une maladie à part entière, qui nécessite un traitement à long terme, sur les plans physique et psychique, et l’intervention de spécialistes de ce type particulier de pathologie.

La prise en charge cognitivo-comportementale de la douleur chronique est un mode de traitement non médicamenteux par lequel le patient est invité à mettre en place des stratégies pour mieux gérer ses capacités fonctionnelles (bilan lombaire, résistance à l’effort, etc.), l’intensité de la douleur et son humeur. Ces stratégies passent par un changement du mode de vie et une adaptation du comportement du patient. Ces deux facteurs sont en effet déterminants pour l’amélioration de la santé, de la qualité de vie, ou pour la réussite du processus de réadaptation post-traumatique ou postopératoire. La volonté de changement se trouve ainsi au cœur de la prise en charge du patient sur le plan psychique. Mais, pour engranger des résultats tangibles au niveau physique, fonctionnel et psychologique, encore faut-il que le patient inscrive ce changement dans la durée.

Dans cette perspective, l’entretien motivationnel s’avère être très efficace avec les patients devant modifier leurs comportements ou habitudes de vie, parce qu’il renforce leur compliance au traitement et en augmente les chances de succès. L’entretien motivationnel a pour objectif de conduire la conversation de telle sorte que le patient puisse évoquer un changement pour lui-même, en se fondant sur ses propres valeurs et ses propres intérêts. Cet entretien prend la forme d’un partenariat collaboratif, au cours duquel le patient est amené à faire émerger sa motivation au changement, le soignant devant, de son côté, accepter que le choix final de changer ou non appartient au patient, et que l’autonomie de ce dernier ne peut à aucun moment être mise en doute.

Ça fait maintenant quelques années que mes accompagnements personnalisés, ou coachings, reflètent ce style particulier de conversation, où la personne exprime en confiance sa pensée, ses sentiments, ses émotions, ses projets. Une conversation non-directive, parce qu’il n’est jamais question pour l’intervenant de suggérer, voire d’imposer ses propres solutions. L’entretien motivationnel permet d’accompagner activement les patients douloureux chroniques sur un chemin qui les conduira, quand ils le voudront, à modifier en profondeur leurs habitudes de gérer la douleur, lorsque celles-ci s’avèrent inappropriées, insuffisantes ou inefficaces.